« Seigneur j'aime la beauté de ta demeure, où réside ta gloire ». (Psaume XXV. v. 8)

L'église Saint-Etienne de Limoges est une des plus belles cathédrales ogivales du sud de la Loire. Par son unité et sa noble ordonnance elle a son caractère original. On y trouve une certaine parenté avec les cathédrales de Clermont-Ferrand, de Narbonne, de Toulouse et de Rodez, ce qui laisse supposer que c'est le même Maître d'œuvre, Jean Deschamps, qui en a établi les plans et dirigé les travaux avec son fils Pierre.

Viollet-le-Duc classe son abside parmi les plus remarquables chefs-d’œuvre du style gothique au XIII^ème s.: « C'est, dit-il, un monument du Nord implanté en Limousin, mais ni dans le centre ni dans l'ouest aucun autre édifice ne peut lui être comparé; il a sa physionomie propre due aux matériaux employés et à l'habileté de ses ouvriers. Au cours de ses nombreuses campagnes de construction, l'unité de plan et de style a été conservée et l'œuvre dans toutes ses parties apparaît aujourd'hui harmonieuse et homogène. »

LES ORIGINES

Cette magnifique cathédrale a remplacé plusieurs édifices religieux qui s'étaient succédé depuis le III^ème s., époque à laquelle, selon la tradition, saint Martial, premier évêque de Limoges, implanta la première communauté chrétienne. L'obscurité règne sur ces premiers sanctuaires, mais on peut penser qu'il y eut dans le cours du V' s. une basilique dédiée à saint Etienne, premier martyr, dont le culte s'est répandu à partir de 415, date de l'invention de son corps. Des fouilles ont mis à découvert en 1876, les substructions des murs latéraux d'une église carolingienne, plus étroite que l'église romane qui lui succéda; de plus non loin du chevet on découvrit des fragments de bas-reliefs et des inscriptions romaines ainsi que des fragments de colonnes de marbre, ce qui laisse penser que la première église s'éleva sur l'emplacement d'une construction antique, temple païen, palais ou villa. C'est de toute manière, en cet endroit, sur le coteau qui domine la Vienne que peu à peu, se forma dans « la Cité » une véritable cité cléricale rassemblant, autour de la cathédrale, de son cloître et de son baptistère Saint-Jean, le palais épiscopal et les demeures des dignitaires du Chapitre avec tous leurs bâtiments de fonctions.

L'ÉGLISE ROMANE

La cathédrale romane remonte au début du XI^ème s. Elle fut construite par l'évêque Alduin, vers 1013, et consacrée le 29 décembre 1095 par le pape Urbain II, lors de son retour du concile de Clermont, où il avait proclamé la première croisade. Plus courte et plus étroite que la cathédrale gothique, il en reste la crypte et les 3 étages inférieurs du clocher. Elle avait la forme d'une croix latine et mesurait 60 m environ de long et 17 m de large, avec un transept de 40 m, à l'emplacement du transept actuel. Il est probable qu'à l'origine elle n'était couverte que d'une charpente apparente et que les voûtes en berceau ne furent construites qu'après les incendies de 1074 ou de 1105.

LA CRYPTE, romane, n'est pas accessible au public, car une partie impor­tante en a été comblée pour soutenir les bases des piliers gothiques du chœur, et elle sert de sépulture aux évêques de Limoges. Elle est située, dans l'axe du clocher, sous les 2 premières travées du chœur et du bas-côté Nord. Elle se compose de 3 petites nefs reposant sur des colonnes trapues aux chapiteaux lisses et aux bases moulurées avec griffes aux angles. Elle se termine par un hémicycle avec un déambulatoire dont les deux-tiers sont murés. Des peintures du XII^ème s. ornaient la voûte et les parois; il en subsiste quelques beaux morceaux importants, notamment un grand Christ en majesté, aux couleurs vives, avec les symboles des évangélistes.

LE CLOCHER ROMAN. — La tour actuelle a 7 étages. Le porche et les 2 étages qui le surmontent sont romans; hélas, toute cette partie est enveloppée extérieurement, sur 3 côtés, d'une forte muraille en pierre de taille, qui en cache l'architecture. Ce renforcement de la base date du XIV^ème s.

Bâti sur plan carré ce clocher-porche, du milieu du XI^ème s., était alors formé de 4 forts piliers d'angles, en équerre, avec en son centre 4 colonnes surmontées de chapiteaux dont l'un est orné de palmettes et de masques. Les 2 étages au-dessus du porche sont légèrement en retrait; le premier est percé de 3 baies sur chaque face, celle du milieu étant plus large et plus haute. Au deuxième étage les fenêtres du triplet sont d'égale largeur. Ces étages sont voûtés en arêtes avec un oculus au centre pour le passage des cloches.

Cet ancien clocher devait être conçu selon le style des clochers limousins, passant du plan carré avec retrait au plan octogonal et gâbles à l'étage de transition et se terminant par une flèche à 8 pans, comme les clochers de Saint-Léonard, de Saint-Junien, de Collonge, d'Uzerche et comme était aussi celui de la célèbre Abbaye de Saint-Martial de Limoges.

Michel Pénicaut - Brochure "la Cathédrale de Limoges" - 32 pages -Nouvelles Editions Latines