Coup d'Etat au Burkina Faso

Les militaires à l’origine du coup d’État sont des éléments de l’armée regroupés au sein du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration, le MPSR. Ils sont les auteurs des mutineries de ces derniers jours dans plusieurs casernes du pays. A leur tête, le lieutenant-colonel Paul-Henri Damiba, qui devient le nouvel homme fort du pays. Il s’est engagé à proposer bientôt un calendrier à l’ordre constitutionnel accepté de tous.

Dans une lettre signée de sa main et diffusée à la télévision nationale dans la soirée du 24 janvier, le président déchu Roch Marc Christian Kaboré dit déposer sa démission dans l’intérêt supérieur de la nation, suite aux événements. Les militaires assurent que tout s’est passé sans violence et sans effusion de sang contre lui ou ses proches. Actuellement, l’ancien chef de l’État se trouve dans un lieu tenu secret.

Colère de la population

Au pouvoir depuis 2015, Roch Marc Christian Kaboré a été réélu en 2020 en promettant de rétablir la sécurité et de libérer le Burkina des groupes terroristes, qui multiplient leurs attaques sanglantes contre l’armée et les civils. Impuissant à tenir sa promesse, l’ancien dirigeant était de plus en plus contesté par une population, excédée par ces violences et l’armée réclamait plus de moyens pour lutter contre les djihadistes. Plusieurs manifestations de colère ont eu lieu ces derniers mois dans les villes du Burkina - et encore jusqu'à lundi - pour dénoncer l'incapacité du pouvoir à contrer les attaques jihadistes qui se multiplient, souvent interdites et dispersées par les policiers anti-émeutes. Dans la soirée du 24 janvier, de nombreux rassemblements ont eu lieu dans le pays pour soutenir les militaires.

Ce dernier coup de force plonge la région un peu plus dans l’incertitude et intervient alors que le Sahel est de plus en plus déstabilisé par les djihadistes, il complexifie également la présence française dans cette zone. Ces derniers mois, la junte militaire a pris le pouvoir au Tchad et au Mali.

Un rassemblement dans la soirée du 24 janvier pour célébrer le coup d'Etat.
Un rassemblement dans la soirée du 24 janvier pour célébrer le coup d'Etat.

Ce coup d’État a été largement condamné à l’international, notamment par les Nations unies qui appellent les putschistes à déposer les armes. Les États-Unis, l’Union Européenne et la France ont exigé la libération immédiate du président Kaboré. 

Réaction de l’Église locale

Dans la journée de lundi, la population vaquait à ses occupations et les écoles étaient fermés, selon des sources locales.

Le coup d'État était une option que de nombreux observateurs avaient jugée «possible» et que le père Ludovic Tougouma, de la communauté missionnaire de Villaregia à Ouagadougou, avait annoncé à la rédaction italienne de Vatican News – Radio Vatican quelques heures avant l'annonce de la nouvelle : «Nous ne savions pas ce qui se passait, avait-il dit dans l'après-midi de la journée du 24, lorsque des rumeurs de coup d'État ont commencé à circuler. Il n'y a pas de mouvement de masse dans les rues mais l'armée et la population ont depuis longtemps le sentiment que le gouvernement est incapable de gérer la sécurité».

«Aujourd'hui, il n'est pas facile de manipuler la population sans avoir de réaction, a continué le père Tougouma, une plus grande conscience d'appartenance au pays est donc importante». La paix, a-t-il ajouté, est également le seul moyen de faire revenir ceux qui ont fui la violence, «Le problème des personnes déplacées est important, tant pour nous, qui les recevons des États voisins, que pour ceux qui ont quitté cette terre et n'ont pas la possibilité d'y retourner.»

Que peut faire l'Église locale dans ce contexte ? «Demandez et exhortez-nous à être unis, lance le religieux, car même s'il y a des différences, l'insécurité est un ennemi commun, et donc l'appel que nous lançons, même dans nos sermons, est de laisser de côté ce qui nous divise et de lutter ensemble contre l'absence de paix, qui fait mal à tout le monde».

Le Burkina Faso est pris depuis 2015 dans une spirale de violences attribuées à des groupes armés jihadistes, affiliés à Al-Qaïda et au groupe Etat islamique qui ont fait en près de sept ans plus de 2 000 morts et contraint 1,5 million de personnes à fuir leurs foyers.

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